16 avril 2022
16 avr. 2022

De la pâque juive à la Pâques Chrétienne

De la pâque juive à la Pâques Chrétienne
Pâque a changé de contenu avec la résurrection du Christ. Désignant antérieurement le passage de l’esclavage à la libération du peuple juif, elle devient chez les chrétiens, synonyme de la résurrection du Christ.
par  Joseph Kuaté, scj
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Pour mieux comprendre la Pâques chrétienne, il faut  remonter dans l’antiquité juive. En effet, le sens et le message de la Pâques, de même que les éléments symboliques qui font le contenu de la cérémonie pascale ont un arrière-fond dans la célébration de la Pâque juive. Au cours des âges  et selon les mutations de la  société juive, la Pâque s’est raffinée en empruntant des éléments  nouveaux. Les juifs furent d’abord des nomades, puis des sédentaires. Ils ont connu  l’exode avant de se fixer sur la terre d’Israël. La Pâques regorge  bel et bien des éléments qui se sont fixés lors de toute la traversée de leur histoire.

1. La préhistoire de la Pâque juive

 a) La fête des nomades

Pendant la période du nomadisme, la fête de Pâque se célébrait au printemps. C’est la saison  ou poussent de nouvelles herbes pour la pâture des bêtes. Cette fête avait lieu la nuit qui précédait  le départ pour la transhumance. On immolait  les premiers-nés du troupeau et on aspergeait leur sang sur les pasteurs et leurs troupeaux en vue de les protéger des forces maléfiques et de leur assurer la fécondité. Leur chair était consommée dans un repas cultuel  pour renforcer les liens entre les membres de la famille et de la tribu.

b) La fête agraire

A l’époque agraire, la Pâque désignait l’offrande de la première gerbe de la moisson d’orge. Les paysans devaient se débarrasser de tous les vieux grains et ne devaient manger pendant sept jours que du pain neuf, aussi appelé du pain sans levain ou du pain azyme. Paul va spiritualiser la pratique dans 1 Cor 5, 7-8 en ces termes : « Dehors le vieux levain, purifiez-vous ! Et soyez une pâte neuve, car le Christ est notre victime pascale et vous êtes le pain sans levain !  Donc plus de vieux levain, levain du mal et du vice, mais célébrez la fête avec le pain sans levain, c’est-à-dire la pureté et la vérité ».

2. La Pâque juive

En Hébreu, la Pâque est appelée « Pesah », ce qui signifie passage. La Pâque juive est la commémoration du passage des Hébreux de l’esclavage égyptien à la libération. Le texte fondateur de la Pâque juive est le passage de l’Exode (12,1-14) que nous lisons le Jeudi-Saint. Il nous indique la date où la Pâque doit-être célébrée : chaque 14 Nissan (fin mars – début avril). Elle est célébrée en souvenir de la nuit de libération où Yahvé passa au milieu de son peuple pour le soustraire de l’esclavage des Égyptiens et lui fit passer la Mer Rouge à pieds secs.

La Pâque juive va épouser les éléments antérieurs dans sa célébration tout en changeant leurs sens. Nous avons l’immolation de l’agneau pascal qui rappelle la fête des nomades. Le sang ne sera plus aspergé sur les bergers et les troupeaux mais on fera désormais des marques sur les linteaux des portes pour que l’ange exterminateur épargne les Hébreux du châtiment à son passage. Le pain sans levain et les herbes amères rappelaient la sédentarisation mais désormais les herbes amères furent le souvenir de la tristesse de l’esclavage, le pain sans levain la pitance du temps de l’esclavage.

Cette fête se célébrait en cinq moments. Le premier moment c’était les bénédictions. Chacun se souvenait des bienfaits de Dieu dans sa vie personnelle et sociale confessait sa grandeur et le remerciait de sa générosité. Le deuxième moment était le mémorial de la Pâque ou de la libération objective. Le chef de famille faisait le récit de l’Exode et le fils cadet lui demandait par la suite “ pourquoi ce rite ?” Ce à quoi le père répondait en citant  Dt 6, 21-25.

“ Nous étions esclaves de Pharaon, en Égypte, et Yahvé nous a fait sortir d’Égypte par sa main puissante. Yahvé a accompli sous nos yeux des signes et des prodiges grands et terribles contre l’Égypte, Pharaon et sa maison. Mais il nous a fait sortir de là pour nous conduire dans le pays qu’il avait promis par serment à nos pères et pour nous le donner. Et Yahvé nous  a ordonnés de mettre en pratique toutes ces lois, afin de craindre Yahvé notre Dieu, d’être heureux et de vivre comme il nous l’a accordé jusqu’à présent. Telle sera notre justice : garder et mettre en pratique tous ces commandements devant Yahvé notre Dieu comme il nous l’a ordonné ”.

Après la réponse du père suivait le repas pascal accompagné d’hymnes, de psaumes et de bénédictions.

La célébration de la Pâque ramenait le juif à trois moments : Par rapport au passé, la Pâque rappelait la nuit de la délivrance mais le mémorial actualisait l’événement. Chaque juif qui mange la Pâque se situe lui-même à la nuit de la première Pâque. Il se sent libéré par Dieu en cette nuit même et c’est pourquoi il lui adresse des prières et des chants d’action de grâce. Mais la célébration avait aussi une perspective d’avenir. On célébrait la Pâque dans l’attente des nouvelles délivrances.

3. La Pâque de Jésus

Jésus est mort lors de la célébration de la Pâque juive. Le dernier repas qu’il a pris le Jeudi-Saint avec ses apôtres évoque le repas pascal familial avec le pain, les coupes les chants d’action de grâce et des prières. (Mt 26, 26-69 ; Mc 14, 22-25 ; Lc 22, 19-20 ; 1Cor 11, 23-25)

Présentant sa mort qui aura lieu le lendemain, il donna un sens nouveau à la célébration pascale. Le pain et le vin qu’il offre à ses disciples sont les signes de son corps et de son sang qui seront offerts le lendemain en signe de l’alliance nouvelle et éternelle liant Dieu et l’humanité. Christ va rendre l’âme évidemment à l’heure où on immole l’agneau pascal au Temple. Il est l’agneau que les nomades offraient et  s’aspergeaient de sang  pour obtenir protection et fécondité.

« Quand il livre son corps sur la croix tous les sacrifices de l’Ancienne Alliance parviennent à leur achèvement ;  et quand il s’offre pour notre salut,  il est à lui seul l’autel le prêtre et la victime. (Préface pascale V)

Christ est l’agneau immolé qui enlève le péché du monde et accorde une fécondité spirituelle aux hommes.

Grâce à lui se lèvent des enfants de lumière pour une vie éternelle
et les portes du royaume des cieux
s’ouvrent pour accueillir les croyants. (Préface pascale III)

Sa Pâque s’exprime dans sa résurrection, victoire sur la mort et le péché. C’est par cette résurrection qu’il se révèle Fils de Dieu. La Pâque de Jésus est le passage de sa mort à la vie, accomplissant la libération définitive qu’annonçaient les célébrations pascales de l’Ancienne Testament. La résurrection du Christ est le signe de l’acceptation par Dieu du sacrifice de son Fils.

4. La Pâques chrétienne

Pâque a changé de contenu avec la résurrection du Christ. Désignant antérieurement le passage de l’esclavage à la libération du peuple juif, elle devient chez les chrétiens, synonyme de la résurrection du Christ. Néanmoins, le sens de passage reste. Elle désigne le passage du Christ de la mort à la vie. La résurrection ou la Pâques chrétienne est au centre de la prédication chrétienne ou mieux la Pâques constitue le noyau de la foi chrétienne. La résurrection du Christ est une réalité qui a marqué les apôtres autant que la libération de l’esclavage a marqué les Hébreux.

Ce Jésus que vous avez crucifié, Dieu l’a ressuscité des morts (Ac 2, 32).
Si le Christ n’est pas ressuscité, vaine serait votre foi et vide notre prédication (1 Cor 15, 12)

Si tu affirmes de ta bouche que Jésus-Christ est Seigneur, si tu crois de ton cœur que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, tu seras sauvé (Rm 10, 13)

Christ ressuscité apparaît à ses apôtres le premier jour de la semaine (Mt 28, 1-8 ; Mc 16, 1-8 ; Lc 24, 1-8 ; Jn 20, 1-2). Le premier jour de la semaine deviendra petit à petit pour les disciples le jour de la commémoration de la résurrection ou de la Pâque du Seigneur. Chaque célébration de l’Eucharistie est une Pâques pour le chrétien. Lors de la consécration, les fidèles revivent l’événement du Calvaire qui accomplit le dernier repas du Jeudi Saint. L’Eucharistie est une anamnèse, un mémorial de la mort et de la résurrection de Notre Seigneur Jésus-Christ. Comme lors de la célébration de la Pâque juive, elle est un rappel, une actualisation et une attente.

Jésus, nous rappelons ta mort et ta résurrection et dans la foi nous attendons le jour de ton retour.

Le baptême est aussi une pâque pour le Chrétien

Nous avons été ensevelis avec le Christ, par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts pour la gloire du Père, nous vivions nous aussi pour une vie nouvelle. (Rm 6,4)

Pour les premiers chrétiens, le baptême nous plonge dans la mort et la résurrection du Christ (Rm 6, 3-11 ; Gal 3, 26-29), de même que la traversée de la Mer Rouge est aussi interprétée comme un baptême (1 Cor 10, 1-13). Christ lui-même interprète sa mort comme un baptême (Mc 10, 38). A l’instar de la Pâque juive, le baptême libère le chrétien de la servitude du péché pour le rendre libre. Il lui confère une identité et fait de lui enfant de Dieu, membre du nouveau peuple de Dieu.

Néanmoins entre le deuxième et le quatrième siècle, la célébration officielle de la mort et de la résurrection du Seigneur sera fixée à la même époque où les juifs célèbrent leur Pâque (le 14 Nissan entre fin mars et début avril).

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