28 décembre 2021
28 déc. 2021

Construire des ponts avec la volonté de les traverser

Récemment, P. Mário Marcelo, scj a été élu président de la société brésilienne de théologie morale (SBTM). Dans cette interview, nous allons en savoir un peu plus sur le travail et les réflexions de notre confrère.

par  Mário Henrique da Costa Nunes, scj

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Le Dr. P. Mário Marcelo Coelho, scj, est très demandé dans diverses parties de l’Église du Brésil pour des conférences et des cours dans le domaine de la théologie morale. Depuis plus de 20 ans, il enseigne à la faculté Dehoniana où il est coordinateur du cours de théologie. Il est membre du Groupe interdisciplinaire d’experts (GIP) de la Commission pastorale épiscopale pour la doctrine de la foi de la Conférence nationale des évêques du Brésil (CNBB). Il a récemment été élu président de la société brésilienne de théologie morale (SBTM), une institution à laquelle il se consacre depuis de nombreuses années. Dans cette interview, nous en apprenons un peu plus sur le travail et les réflexions de notre confrère.

Mário Marcelo, nous avons reçu la nouvelle de votre élection à la présidence de la Société brésilienne de théologie morale (SBTM). Pouvez-vous expliquer, en termes généraux, le travail du SBTM ?

La société brésilienne de théologie morale a été fondée en 1977 par un groupe de professeurs, théologiens moraux, qui travaillaient dans des séminaires et des facultés catholiques pour enseigner la théologie morale. Le SBTM a pour principaux objectifs de créer un climat de réflexion et de rencontre entre les théologiens moraux du Brésil, d’offrir des subventions pour l’étude de la théologie morale, de stimuler la production d’articles scientifiques dans le domaine de la théologie morale et d’assurer le dialogue entre les chercheurs en théologie morale et les autres scientifiques. Depuis lors, les théologiens moraux catholiques brésiliens se réunissent dans un congrès annuel pour réfléchir aux défis éthiques que la société et l’Église vivent dans une perspective théologique.

Quels sont les principaux défis et projets auxquels vous et l’équipe du SBTM qui vous accompagne dans cette administration entendez-vous consacrer ?

En novembre 2021, nous avons eu l’Assemblée annuelle de la SBTM et nous avons réfléchi aux défis de la Théologie Morale, en particulier dans le contexte “post-pandémique” …. si nous pouvons dire “post”. Nous avons ressenti la nécessité de construire des ponts et la volonté de les traverser, en vue du dialogue avec les différentes cultures, ethnies, religions, sciences, avec la société et avec l’autre, en dépassant les barrières et les préjugés. Nous concluons que l’éthique théologique doit relever ce défi de traverser les ponts au-delà des frontières qui nous séparent des autres disciplines, sciences, perspectives, méthodes, idéologies, institutions, pays, cultures, etc. En conséquence, le thème choisi pour le Congrès de 2022 était : ” Traverser les frontières : une urgence pour l’éthique théologique aujourd’hui “.

Le théologien Roche souligne que le moment est venu de franchir les ponts : “Franchir des ponts exige le courage d’entrer dans un espace liminal et d’espérer être accueilli de l’autre côté.” […] “Les personnes de bonne volonté peuvent être en désaccord sur certains détails et nous devons donc tous traverser certains ponts. Je traverse les ponts pour apprendre d’autres personnes sur leurs expériences. Je traverse les ponts pour accéder aux ressources. Je discerne les ponts à traverser pour que la dignité et la beauté des personnes marginalisées soient sincèrement élevées et honorées.

Nous savons que la théologie morale est en première ligne, dans une intercession continue entre la pensée de l’Eglise et la société actuelle. En tant que religieux, sommes-nous prêts à faire face aux problèmes qui se présentent ?

Dans un premier temps, j’ai pu penser que oui, nous sommes prêts à faire face aux problèmes actuels. Nous avons une bonne formation. Nous avons étudié la philosophie et la théologie, en plus de la formation que nous recevons dans les séminaires et les couvents. Les cours de philosophie et de théologie nous aident à réfléchir, à discerner, à analyser ; je peux dire que nous sommes privilégiés. Cependant, lorsque nous sommes confrontés à la réalité, je me rends compte que ce n’est pas tout à fait comme ça. Si, dans le passé, la connaissance était “entre les murs des séminaires et des couvents”, aujourd’hui elle est “hors les murs”. L’histoire selon laquelle les prêtres religieux étaient les détenteurs du savoir n’existe plus. Les personnes qui ont le plus de connaissances sont dans l’enseignement supérieur : elles étudient, réfléchissent et nous interrogent sur les “vérités” que nous proclamons. Ils veulent comprendre la foi de manière intelligente.

La société évolue, le temps passe, des transformations rapides ont lieu et les exigences changent également. Nous avons une nouvelle réalité de l’Église dans le monde et nous vivons des transformations scientifiques, sociales, politiques et ecclésiales toujours plus rapides. Nous sommes à l’ère de l’évolution des biotechnologies, de l’information, de la communication et de l’internet. Le monde est presque virtuel. La connaissance est au bout de nos doigts. Cette nouvelle réalité qui est devant nous et qui nous interpelle, concerne aussi l’individu qui se présente comme candidat à la vie religieuse ou au sacerdoce. Nous avons des questions, de nouveaux problèmes qui exigent de nouvelles réponses, défiant non seulement la foi, mais aussi la raison elle-même. C’est dans ce contexte que la théologie et la philosophie doivent dialoguer avec tous les courants de pensée et avec les différentes sciences.

La formation intellectuelle doit fournir à tous les religieux et clercs une culture générale appropriée à la situation de chaque contexte culturel, géographique et historique. Pour une évangélisation et une inculturation efficaces de la foi dans le monde d’aujourd’hui, une solide préparation philosophique, théologique et culturelle est indispensable. Le candidat doit prendre conscience de la nécessité d’acquérir les outils conceptuels appropriés pour répondre à quiconque l’interroge sur les raisons de son espoir.

Une dernière question. Dans quelle mesure la théologie morale peut-elle contribuer à la formation religieuse et sacerdotale aujourd’hui, face aux défis d’une société diverse, pluraliste et exigeante ?

La formation des futurs religieux/prêtres manque d’une solide formation générale. Pour devenir le leader d’une communauté, il faut non seulement de la bonne volonté et du dévouement, mais aussi de la compétence, de la profondeur et du dévouement. Dans un monde où prédomine la culture du superficiel, de la violence, de la mort, dans cette “société liquide”, il est nécessaire d’annoncer la vie, l’espérance, la paix, et les conditions du discernement. Dehon dit cela : “Eduquer un chrétien, ce n’est pas seulement lui donner des notions de sciences humaines qui lui permettront d’obtenir un statut social. Avant tout cela, il est nécessaire de créer en lui un caractère noble et excellent, des habitudes pures, des vertus fortes. C’est former en lui la foi qui ouvre l’entendement au monde invisible, l’espérance qui fortifie le cœur par la perspective d’un bonheur mérité, et l’amour qui rend Dieu perceptible à travers les nuages denses de la vie.”

A partir de l’inspiration précédente, je crois que notre contribution consiste à former des pasteurs approfondis dans les études académiques, capables de faire une lecture critique des signes des temps et de dialoguer avec la société, en devenant lumière. La philosophie et la théologie ne peuvent pas devenir de simples études privées de la foi et de la religion ; nous ne pouvons pas les transformer en une “subjectivation de la religion ou de la foi”, en un relativisme religieux, en une adhésion subjective uniquement à ce qui me plaît ou me convient, ou même en “donner au peuple ce que le peuple veut”, mais, dans le cadre de l’ensemble globalisé, en dialogue avec les sciences, donner une réponse à la lumière de la raison et de la foi aux défis sociaux, écologiques et existentiels de notre époque.

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